1er O C T O B R E de jadis 1943..1942......1923

Ce rébus attend sa solution depuis 1942. Il figure dans l’almanach Hachette 1942, que je

viens de retrouver au fond d’un carton de mon déménagement. C’était alors la St Rémi ; on honore aujourd’hui Sainte Thérèse de l’enfant Jésus, la petite, celle de Lisieux.

1 9 4 3. Après quelques hésitations, Vichy a décidé de retarder au 18 octobre la rentrée scolaire en métropole .  Pour les lecteurs du Petit Journal,  le catholique pleurard Daniel-Rops tourne la page de ce « bel   été »  « un répit au milieu de tant de maux passés, présents et à venir, premier indice de la miséricorde. Dans les colonnes voisines un plumitif  manie avec précaution  la phraséologie du régime : organiser une éducation vraiment nationale pour que l’âme des jeunes Français soit formée dans le cadre de la nation au récit de notre histoire dans l’amour de notre sol et de nos traditions… le gros de l’œuvre éducative

revient de droit aux communautés naturelles où tout enfant se trouve progressivement engagé …   avec un contrôle de l’État pour les rectifier quand elles s’égarent, les encourager quand leur action est droite, saine et féconde. Venant en appui, la parole du chef de l’État  dans la « Revue des deux Mondes » est moins ambiguë.  Dans l’école de demain, il faudra prendre parti hardiment…. entre le vrai et le faux,  la France et l’antiFrance. De l’autre côté de la Méditerranée, en Algérie, la rentrée a lieu à la date consacrée.  Les autorités y  tiennent un tout autre discours. S'adressant par la TSF directement aux écoliers le   commissaire à l’Éducation nationale, le docteur Abadie parle net: il flétrit les discriminations raciales de Vichy, sa défiance envers le corps enseignant et célébre l’esprit de résistance incarné par la France libre Il y a un an vous êtes entrés dans vos classes ayant au cœur, même au milieu de vos rires, la honte secrète d’être des vaincus. Vous cherchiez vainement des yeux vos camarades chassés par  haine de race. Pour la même raison, plusieurs de vos maîtres manquaient ou parce que leurs croyances et leur patriotisme en avaient fait des suspects ou de prétendus criminels. Au dehors de l’école, à l’occasion d’un « lever des couleurs », trop souvent vous entendiez proposer comme vertus nouvelles le mouchardage, la calomnie, la délation. Cependant par certains de vos

éducateurs si indignement calomniés et que leur ardente foi patriotique et républicaine continuait à inspirer, par vos familles auprès desquelles chaque soir les ondes interdites apportaient le réconfort des paroles lointaines, vous saviez qu’à l’appel d’un chef dont vous entendiez la voix exaltante, des Français s’étaient groupés. Ils prouvaient les armes à la main que la débâcle de 1940 était une bataille perdue et non une défaite irrémédiable. Vous saviez aussi qu’un autre français indomptable n’avait reconquis sa liberté que pour reprendre son rôle de grand chef militaire  ( « L’Echo d’Alger « 1^er octobre 1943)

En métropole cependant, on s'achemine vers  trois semaines de vacances supplémentaires.

   Comment occuper les élèves ? Radio-Paris   ( la fameuse station brocardée par Pierre Dac depuis Londres : Radio-Paris ment, Radio-Paris est allemand ») innove : elle invente le télé-enseignement. Sagement assis autour de la table de salle à manger, sous l’œil attentif de leur mère, ces enfants prennent la pose  pour la photo : ils écrivent sous la dictée de la voix sortie  du poste qui trône en bout de table sur son napperon.  Ironie, ce soir-là qui sait, l’oreille collée au haut-parleur d'une radio similaire,   avec mille précautions, une famille essaiera d'écouter les messages brouillés de la  France Libre….  En attendant, un « terroriste » 'selon le vocabulaire  de la collaboration) a mis dans un état « désespéré » le  si mal nommé Docteur JOLICOEUR, une personnalité  régionale du Parti Populaire

Français,  fondé par l’ex-communiste DORIOT. Malgré  ses accents de sincérité affectée ,

« le président » Laval en déplacement à Paris est sur la défensive lorsqu’au nom de la lutte contre le bolchevisme, ’il tente de  convaincre la France occupée du bien-fondé de sa politique . La vie quotidienne devient un tracas de tous les instants  en dépit de la  mise en place d’un système pointilleux de tickets de rationnement qui loin de rassurer ne fait qu’amplifier le sentiment de précarité et de pénurie institutionnalisée. Qu’importe la lutte contre le bolchevisme quand on manque de tout , et de savon d’abord.  Manteaux capitonnés, longues robes noires dont les ceintures flottantes semblent s’enrouler autour de la silhouette, juvéniles robes de lainage…Il n’y a bien que le collabo

« Paris-Soir » pour oser faire une place aux « ingéniosités » de la haute couture.

1 9 2 3  Certes, on peut bien rêver et revivre en esprit la frivolité et les audaces des créateurs des années vingt, dans un pays alors en pleine effervescence de sa reconstruction .  Envoyé « couvrir » l’inauguration  d’une cité -jardin près de Lens, le reporter du très mondain "Excelsior", ( une rubrique « le monde » informe des déplacements des rois et de l’aristocratie )  a du mal à garder la tête froide: il se sent en villégiature   dans les corons tout neufs d’ Avion. Le pilonnage avait été si complet qu’il ne restait rien d’identifiable, que seul l’endroit où avait été le clocher se pouvait reconnaître à son amoncellement de briques et de gravats. …Ah le beau voyage, l’émouvante résurrection… si l’on ne savait que c’est au prix d’un immense drame collectif  que tout est neuf, pimpant, solide et individuel. … Et voilà bien la plus absurde des impressions que nous avons prises ici comme invité et la plus juste des images créées par une puissante illusion : avec l’éclatane chaleur, le ciel pur, les marques d’ombre et ces villas légères aux couleurs gaies, l’on se croirait au bord de la

mer, sur une plage qui n’a jamais connu que le bonheur…Une parisienne marche devant nous et le voile souple qui l’habille a des transparences de toilettes d’été. Un vigoureux soleil , insolite dans ce climat, est le roi de la fête…. De luxueuses automobiles – Lens, Arras, Lille sont riches- ajoutent encore à notre illusion. Et si cette impression est fausse, la gaieté qui se lit sur les visages ne l’est pas. Ici tout est sincère le plaisir comme le travail. Avion sur mer, Lens les bains , Deauville sous Lens! ...Et  dire qu'il faudra tout rebâtir en 1945.

 Un peu d'intemporel pour conclure: des nouvelles du ciel et de l'ovalie... il y a cent ans