J m o i n s t r e n t e 24 novembre 1942

Moins trente ? Moins trente ? Et oui, ce 24 novembre 1942, c’est dans trente jours que lartesien , votre blogueur,  va naître.

       Drôle d’époque pour arriver en ce bas monde, mais il l’ignorait, le bienheureux et puis finalement, il a fait partie des fameuses « classes creuses » arrivées sur le marché du travail en plein boom des Trente Glorieuses. Nul n’en savait encore rien bien sûr, lui moins que tout autre. On fêtait ce jour-là les Flore  -remplacées aujourd’hui par Flora . Demain ce sera Ste Catherine  (tout bois prend racine, rappelez-vous), après demain Delphine   - j’en profite pour saluer ma

nièce et toutes les autres Delphine, si nombreuses à une certaine époque.

Revue de Presse du 24 novembre 1942.

 Avec l’opération Torch Novembre 1942 aura  été un mois capital pour le  conflit . Les anglo-américains ont débarqué au Maroc et en  Algérie,  plus ou bien accueillis,  aidés par la résistance locale ou bloqués  par le pouvoir officiel - singulièrement hésitant et déchiré mais qui abandonne la Tunisie aux Allemands . Les manchettes de la presse  des deux côtés de la Méditerranée reflètent ces atermoiements -attentisme ou enthousiasme qu’il faut cacher. Bien sûr le Petit

Marocain ou l’Écho d’Alger accordent la meilleure place à cette actualité brûlante quand là-haut, Le Grand Écho du Nord en reste aux aspects classiques du conflit en Europe ou à la relève qui permet aux prisonniers de rentrer  en échange d’une main d’œuvre  française envoyée en Allemagne . Le  volontariat n’ayant pas le succès escompté, en février 1943 l’occupant instaurera le STO, ce

qui obligera  mon père à changer chaque soir  de cachette. Le voisinage d’une réclame pour la

loterie nationale séduira-t-il quelque employée de maison à s’exiler en Saxe ?  Pourquoi pas ? Lecture édifiante  des petites annonces ou du service du

Figaro : la dureté des temps, la nécessité  poussent bien des femmes distinguées ou instruites   à un déclassement déguisé dans  ces emplois de gouvernante, de dame de compagnie qui cachent peut-être des travaux  honnêtes sans doute mais plus ingrats. Il vaut mieux être catholique, avoir même une forte constitution.

 Dans l’espace des deux pages auxquelles sont réduits les journaux, s’immiscent pour l’information du lecteur et sa distraction la vie quotidienne, les problèmes de ravitaillement, de tickets , et des faits divers : une  rixe de bistro, un abattage clandestin façon « la traversée de Paris «  en version artésienne  , avec ce boucher Warin – un nom qui me revient en mémoire car grand-mère Lucienne après la guerre se

fournissait chez lui, qui joue les naïfs  (tiendra-t-il long temps ?) et prétend ignorer tout de ce qui se tramait dans son hangar …

                 Le Figaro littéraire replié en zone Sud sauve les apparences : Une littéraire, avec un morceau de choix, les illustrations de Matisse pour quelques poèmes de Ronsard. La vie mondaine du jour se rétrécit à une  scène de sous-préfecture animée par quelques hobereaux , rehaussée pourtant d’une naissance dans la famille  Claudel au château de Brangues  ;  bien sûr , le lecteur bourgeois se voit proposer des clapiers standards   mais la mode ignore ici avec panache les restrictions :« l’élégance folle des chapeaux », «  le  lapin joue au castor, à la loutre, à l’hermine » . Drouot prospère, approvisionné dans des conditions incertaines .

  En ces temps où le mot d’ordre est à la  sobriété éneer'gétique, osons une mesure radicale, inspirée    des instructions partout répétées dans la presse de l’Occupation: CAMOUFLAGE DES LUMIERES de 17h à 7h44, et pas seulement dans les rues.