17 septembre actualités d'hier
17 septembre. Bon anniversaire CHRISTIAN !
On fête les Renaud, d’estimables personnes en général, ceux que je connais du moins. Je pense à eux.
S’il pleut à la Saint Renaud, l’automne s’annonce penaud dit-on en Charentes. Rime bien trouvée mais...« penaud » comment ?Automne pourri ? Ensoleillé ? Nous voilà bien avancé !
Les Lambert étaient autrefois à l’honneur. Penser aussi aux Lubin, un prénom qui fleure bon le XVIIIe siècle (c'est d'ailleurs le nom d'une parfumerie fondée à l'époque et qui existe toujours). Peut-être va-t-il revenir à la mode !
Ce nouveau billet est dédié au susnommé Christian, autrefois grand amateur de grenouilles, non pas un froggy, mais un collectionneur de tout objet en forme de rainette ou décoré d’un batracien. Il en a fini avec cette addiction. Pour la retraite qui se profile, il va devoir s’en trouver une autre.
60 ans ! Et né en 1960.
En cadeau pour cette coïncidence tu mérites bien le «Hope », un caillou assez monstrueux au fond mais d’une couleur extravagante, miraculeuse, bien mal rendue par les photos. Une légende. L’avatar retaillé et américanisé de l'énorme « Diamant bleu » volé avec tous les autres bijoux de la couronne de France ce 17 septembre 1792, - qui deviendra dans le calendrier révolutionnaire le jour de la Vertu, quelle ironie, et ce n'est pas la seule ! Hope ? Espoir ? Non : tout bêtement le nom de son premier propriétaire américain. Sans compter une réputation de malédiction qui entoure cette pierre mythique conservée depuis 1949 au National Museum of Natural History à Washington. J.-Y. Le Drian devrait tenter le coup et le réclamer. Ça ferait du bruit, sans altérer outre mesure nos rapports actuels, de toute façon détestables, avec l’actuel locataire de la Maison Blanche.
Restons pipeul. Christian, devine qui est née le même jour que toi, mais avant-guerre? Gisèle Marie Madeleine TALLONE, bien sûr. En 1921.
- Fille de fleuristes italiens installés sur la Côte d’azur,
- en 1946 je souffle Yves Montand à Édith Piaf,
- en 1947 je vis pendant six ans une romance avec le prince Rainier ; quand il doit monter sur le trône, le conseil de la principauté voit d’un mauvais œil mon possible mariage avec le prince et argue d’un certificat de stérilité pour m’évincer en 1953.
- Je me console dans les bras de Gary Cooper le temps d’un film.
- En 1955 je retrouve un amour d’enfance Raymond Pellegrin et nous nous marions … et nous avons une fille.
- Je suis, je suis…..Non, tu ne vois pas ?
Gisèle P A S C A L - Ah ! - Oui, c’était une vedette populaire des années 40-50 ; on la confondait avec Danièle Darrieux ou Micheline Presle dont elle avait le piquant et la distinction. Elle n’a pas eu les metteurs en scène, ni les rôles, propres à lui assurer la gloire bien qu'elle ait tourné avec les Allégret, Marcel Lherbier, Sacha Guitry… Et elle avait une belle voix. Elle aurait pu être notre Grace Kelly… Il lui a manqué un Alfred H. mais elle a eu son Raymond P..
Dernière minute (le diable est dans les détails) sur la rupture entre Rainier et ma Gisèle : pas du tout une histoire de stérilité, ou d’origine trop roturière me révèle Cinémémorial: le Père Francis Tucker, conseiller spirituel du prince, [américain d’origine irlandaise « sélectionneur » sourcilleux des candidates] s'interposa pour interdire le mariage, arguant que Gisèle Pascal était d'origine juive polonaise. On raconte que lorsque Rainier mit fin à son aventure, il dit au Père Tucker : " Si vous apprenez un jour que mes sujets pensent que je ne les aime pas, dites-leur ce que j'ai fait pour eux aujourd'hui ! ". C’est une des rares mentions de ce motif, révélateur de l’antisémitisme persistant d’une certaine hiérarchie catholique, en dépit de l’Histoire récente.
Christian, tu ne l’as pas fait exprès, mon vieux, mais le moment était bien choisi pour ton arrivée sur terre : on était en pleine rentrée des classes; en revanche pour une
première sortie, la météo n'était pas tendre ! Sur le Massif Central temps variable, averses. Vent d’Ouest modéré assez irrégulier. Maxima de l’ordre de 17 à 20 ou 21° prévoyait Paris-presse-l’intransigeant. En fait, c’est carrément l’inondation en Corrèze: tandis que ta mère et toi vous êtes bien au sec à la clinique de Brives, la Vézère déborde dans toute sa vallée : ton père ravitaille la famille en barque. L’eau clapote sur l’escalier qui mène à l’étage surélevé de ta maison natale solidement bâtie en énormes pierres rouges sur un talus au bord de la route qui serpente d'ordinaire dans la vallée d’une rivière sans histoire. La télévision cependant s'installait peu à peu dans tous les foyers, les frigidaires aussi mais la machine à laver restait une rareté : il fallait faire bouillir le linge dans une lessiveuse (avec SUNIL bien sûr) même dans les quartiers chics et le distingué« Bon Marché » en proposait dans son catalogue.
C'est en fin d'année qu'Hergé fait paraître son album « Tintin au Tibet ». Il lui aura servi de cure pour sortir d’une grave dépression. Les heureux possesseurs d’un des 100 exemplaires de l’édition originale apprendront avec plaisir qu’il vaut 5000€. La première et la dernière pages ont des particularités qui signalent cette édition de 1960 aux connaisseurs
Loin de ton moïse et de Varetz /Venise, de par le vaste monde l’agitation régnait. CASTRO était au meilleur de sa forme à l’ONU. C’était la fin de l’Empire colonial français – pardon de l’Union française : tout au long des mois de juillet, août, septembre les colonies ont accédé à leur indépendance officielle. Au Congo belge, la passation est tragique, après un début apparemment planifié, et des élections remportées par Patrice Lumumba. Le leader se radicalise, une sécession du Katanga avec à sa tête Moïse Tschombé est inspirée par la CIA et soutenue militairement par la Belgique. En septembre, LUMUMBA vient d’être démis par son Président et le 14, MOBUTU
prend le pouvoir. Lumumba se cache. Il sera poursuivi, pris, torturé – je garde le souvenir de photos le montrant – lui ou son cadavre- traîné enchaîné à un camion. Son corps, apprendra-t-on plus tard, fut découpé et noyé à l’acide par des policiers ou des mercenaires belges. Ne resteront que quelques dents gardées comme trophées. L’une d’elle vient d’être rendue à sa famille il y a tout juste une semaine par un des participants de ce massacre (il raconte qu'avec ses comparses il s'était copieusement abreuvé avant d'entamer la besogne). Mobutu aura le cynisme de consacrer Lumumba héros national dès 1966…. Paris-presse préfère mettre en valeur la Belgique d’une manière plus frivole, en pointant sa Une sur les fiançailles du roi à la triste figure, Baudoin, roi malgré lui.
En France, actualité tout aussi lourde, bien loin de Point de vue et Images du monde. Cachée dans un coin de la première page de Paris-presse la guerre d’Algérie continue. Pour une durée de dix-huit à trente mois, les appelés du contingent sont tous envoyés là-bas en vue d’ « opérations de maintien de l’ordre » de moins en moins comprises dans leurs rangs : De Gaulle vient d’assurer le 5 que « l’Algérie algérienne est en marche ». De leur côté 121 personnes dont Jean-Paul Sartre signent le fameux manifeste des 121 pour le droit à l’insoumission.
En arrière toute.
Vingt ans avant, 1940. En trois mois Pétain a trouvé ses marques à Vichy, dans sa zone « NONO » ( non occupée). Il vient de limoger – provisoirement- Pierre Laval. Une phase de la bataille d’Angleterre, un raid massif sur Londres, le Blitz est en train de se terminer. Hitler a renoncé pour l’instant à son plan d’invasion, la vague de bombardements n’ayant pas eu les résultats escomptés. La faute à une météo exécrable, à l’intrépidité des pilotes
britanniques, à la machine à décrypter Ultra et aux radars installés en réseau sur la côte. Repliés en Auvergne, le Petit Parisien et Le Temps se bornent à retranscrire les communiqués de Londres et de Berlin, se permettant néanmoins en Une (Le Petit Parisien surtout) quelques commentaires discrets: « en état d’alerte continuelle depuis neuf jours », « ne connaît plus le sommeil » « vagues compactes de l’aube à la nuit». Le Temps ose « une formidable bataille » mais titre sur « la guerre anglo-allemande », comme si la France n’était en rien concernée par les événements, ce qui est la doctrine officielle puisque un armistice a été signé. Paris- Soir, de mise en page très moderne, choisit
en bon vichyste sur cinq colonnes l’arrestation de Léon Blum « la justice en marche ». La bataille d’Angleterre devient benoîtement « l’activité de l’aviation allemande au-dessus de l’Angleterre ». Le Matin, ouvertement collaborationniste, se veut encore plus clair : le gros titre porte sur l’arrestation des responsables de la défaite, Léon Blum, Daladier, Gamelin. Une photo aérienne sur Londres en flamme, un sous-titre suggérant là l’action directe du
maréchal Goering, un billet tonitruant et provocateur intitulé
« la tyrannie anglaise est morte » : belle illustration de la devise prise à Chamfort « les caractères vigoureux se reposent dans l’extrême ». Le Daily Mail du jour s’offre le plaisir d’une caricature : à la roulette, Goering et Hitler ont perdu; l’aviateur anglais-croupier ramasse tranquillement la mise.
Un grand saut en arrière de 150 ans: 17 septembre 1870. PARIS ASSIÉGÉ.
Voir le jour à ce moment-là était une vraie catastrophe. Tu as bien fait d'attendre un peu, Christian.
Le gouvernement de défense nationale choisit de rester à Paris . Deux ministres sont envoyés à Tours coordonner l’action en province qui ne prendra un vrai départ que début octobre avec l’arrivée rocambolesque de Gambetta en ballon: il va réorganiser en profondeur l'effort militaire avec la création des armées du Nord, de la Loire, de l’Est et des Vosges.
Les négociations de paix s’enlisent : Bismarck veut à tout prix s’emparer de la capitale française au moindre coût militaire, en l'affamant, malgré la réprobation internationale, qui reste purement morale. Paris s’apprête donc dans la fièvre à soutenir un siège. On renforce les fortifications (construites à l’initiative de Thiers à partir de 1840), on organise des camps ; la garde nationale s’entraîne (il y a de quoi faire). Dans la capitale et partout en France on encourage la formation de corps francs formés de volontaires plus ou moins organisés. L’action de ces francs-tireurs n’est pas toujours comprise des populations, qui voient surtout les représailles qu’entraînent les coups de mains des partisans. Les Prussiens, eux, leur dénient le statut de combattants et les traitent comme des criminels. Cette hantise des corps francs expliquera encore dans les premiers mois de la guerre 14 nombre des exactions allemandes (le mot n est pas exagéré) en Belgique et dans le Nord de la France sur les populations civiles par des mesures de rétorsion visant l action réelle ou supposée d éléments isolés. Les habitants des communes de la banlieue fuient les avant-gardes d’uhlans terrifiants avec leurs immenses lances et courent chercher refuge intra-muros avec leurs bestiaux et des voitures de foin, de blé.
Tant que Bazaine tient Metz, la coalition allemande est gênée dans ses mouvements. Quoi qu'il en soit, lentement mais sûrement deux groupes d’avant-gardes font mouvement vers l’Est et le Sud de Paris, à peine ralentis par les francs-tireurs qui les harcellent sans tactique. Un premier engagement a lieu du côté de Créteil, à Montmesly.
Quand aux prisonniers des premiers combats et de la capitulation de Sedan, ils sont à la peine. Les pluies abondantes qui tombent dans l'Est gênent la progression des troupes allemandes mais surtout aggravent la situation des 80000 prisonniers de Sedan enfermés du 2 au 12 septembre dans leur camp provisoire d’un méandre de la Meuse, la presqu’île d’Iges. Gardés par des bavarois particulièrement brutaux dit-on, ils sont parqués avec leurs chevaux sans matériels de campement, affamés, recevant chichement des rations acheminées depuis Mézières. Des centaines meurent de faim ou de dysenterie en avalant une nourriture avariée ou en buvant l’eau de la Meuse polluée par les cadavres. Les survivants partent ensuite à pied jusqu’à Pont-à-Mousson à une centaine de kilomètres. Une chance: dans ces longues colonnes difficiles à garder, les évasions sont nombreuses. Après cette marche épuisante, les prisonniers sont transportés en train dans des wagons de marchandises, parfoisdans des tombereaux non couverts sous la pluie, jusqu’à leur lieu de captivité en Allemagne.
Après cette plongée dans la misère de l'autre siècle, grande envie de retrouver les
chaleurs estivales de cette mi-septembre 2020 à Clamart ou ailleurs. Et un grand bol de fraîcheur sur les hauteurs de l'Himalaya.
Bon anniversaire, CHRISTIAN !
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supplément d'info sur Gisèle PASCAL